TRIBUS PERDUES ET RETROUVEES
LES " BETA ISRAEL
" ou FALASHAS
Localisation de la tribu et population
Les Falashas sont des émigrés qui se
sont réfugiés sur la côte d'Abyssinie ; puis après la
conversion à la chrétienté au 4ème siècle de la dynastie impériale
d'Axoum, ils se sont réfugiés sur les hauts plateaux
d'Ethiopie, dans de petits villages du Tigré, autour du Lac
Tana, à Gondar et au Semyen.
Selon la tradition falasha, leur
ascendance proviendrait de la tribu de Dan qui se serait dispersée
aussi bien au Yémen qu'en Arabie septentrionale.
Selon l'époque et les sources, la
population a évolué entre le million, à l'apogée du royaume
falasha au Moyen Age et 100 000 âmes au début du 20ème siècle.
Coutumes et lois
Les Falashas observent les lois bibliques
de pureté et de cashrout, d'abattage rituel des animaux qui sont
dépouillés du nerf sciatique. Ils procèdent à des bénédictions
avant et après les repas. Les familles sont monogames et
exemplaires en matière de solidarité, les époux ayant des
droits égaux. Ils pratiquent la circoncision le 8ème jour ainsi
que l'excision. L'éducation religieuse des jeunes est considérée
comme primordiale, notamment l'enseignement et la connaissance
des psaumes en guez, langue liturgique. Considéré comme impur,
le défunt est enterré dans la journée, le deuil durant sept
jours avec un " tazkar " (mémoire) le 7ème jour et au
bout d'un an après l'enterrement.
Les Falashas sont réputés pour leur
propreté et ils sont appelés par les éthiopiens " ceux
qui sentent l'eau ". De même un Falasha qui touche un étranger
est considéré comme impur et doit s'immerger dans un bain
rituel.
Avec la vie moderne, ces coutumes ont
tendance à disparaître sauf dans les régions du Semyen et de
Quara.
Les " Beta Israel " ont des prêtres
qui disent descendre d'Aaron, mais ils ne connaissent pas la
tradition rabbinique ni le Talmud. Ils ont également des
religieux et des nonnes qui vivent reclus dans des monastères.
Le centre spirituel est la synagogue
appelée " masgid " qui comprend deux parties: l'une
est appelée " saint des saints " où on lit la Bible
dans un livre écrit à la main (il n'y a pas de rouleau). Dans
l'autre partie on procède au sacrifice de l'agneau pascal sur
une pierre. Il y a sept prières quotidiennes, mais les
participants n'en suivent qu'une ou deux. La sainteté du shabat
est scrupuleusement respectée et la journée est consacrée aux
prières et aux chants en amhari, langue locale. Ils observent
toutes les fêtes et les néoménies. Par contre ils ne soufflent
pas dans le shofar (corne de bélier) , ils ne connaissent pas
les symboles de soukot et ils ne fêtent pas Pourim ; pourtant
ils observent le jeûne d'Esther.
Origines et légende tribale
La famille royale éthiopienne aurait une
lignée sémite, l'Ethiopie ayant été gouvernée depuis le 2ème
siècle avant l'ère courante à Axoum par une dynastie appelée
" negus-nagast " et venant de la péninsule arabique.
Cette dynastie remonterait à Menelik, fils des amours du roi
Salomon avec la reine de Saba. Le lion de Juda est resté un
symbole impérial jusqu'à Haïlé Sélassié, dernier empereur déchu
par une junte marxiste. La langue sacrée et littéraire est le
guez, langue sémite. La Bible éthiopienne est en guez.
D'après la légende, les " Beta
Israel " seraient les descendants des notables Juifs qui ont
raccompagné Menelik dans le pays de ses ancêtres. Sur le plan
scientifique, ils appartiendraient à une ethnie locale les
" Agaou " qui se serait convertie au Judaïsme sous
l'influence des Juifs d'Arabie ou de Juifs venant d'Egypte, bien
avant l'invasion de l'Ethiopie par les tribus arabes,
vraisemblablement au début de l'ère courante, après la
destruction du Temple de Jérusalem.
Les " Beta Israel " se sont
forgés une identité et un royaume lors de luttes permanentes
contre leurs voisins et contre le pouvoir établi du Negus
converti au christianisme au 4ème siècle. Ces luttes ont duré
plus de 13 siècles, avec des hauts et des bas. Au 17ème siècle,
le Negus réussit à les battre et à les asservir. Ces efforts
de conversion des falashas au christianisme ont été relayés
par les missionnaires protestants au 19ème siècle.
Les " Beta Israel " ont été
retrouvés dans un dénuement matériel et spirituel total en
1830 par des missionnaires anglicans. Ils ont été suivis et réhabilités
en tant que Juifs par deux français de l'Alliance entre 1867 et
1949, Joseph Halévy et Jacques Faitlovicz.
Lors de la révolution marxiste, les
Falashas étaient menacés d'extinction par assimilation quand
ils furent sauvés en deux vagues successives d'émigration vers
Israël à travers des marches épuisantes au Soudan, opérations
à la fois épiques et tragiques. Les opérations Moïse en 1984
et Salomon en 1991 sont dans toutes les mémoires.
Aujourd'hui il y a 75 000 falashas en
Israël dont le gouvernement continue à faire venir les parents
non Juifs, les " Falash Moura " (20 000).
Littérature et folklore
Des manuscrits en guez circulent entre
les villages falashas. Il s'agit des préceptes du shabat (Téezaza
sanbat), d'un sermon d'un rabbin lié aux commandements et à la
vanité d'une vie de plaisirs (Abba Elias), des livres de Baroukh
(apocalypse chrétienne), d'Abraham (commémoration des morts) et
de Moïse (Mota Mosye ou la mort de Moïse), les éloges de la
sagesse....
Les chansons folkloriques relatent les
liaisons du roi Salomon avec la reine de Saba, la naissance et
l'arrivée des Juifs avec Ménélik et en particulier un épisode
" Ménélik a volé l'Arche Sainte dans le Temple et il a
traversé une rivière le shabat, avec l'objet sacré ; parmi les
Juifs qui l'accompagnaient, ceux qui l'ont imité sont devenus
chrétiens ; ceux qui se seraient abstenus de traverser seraient
devenus Beta Israel "
Le rabbin le plus vénéré des Falashas
est Abba Zabra du 15ème siècle. Il était tellement populaire
et charismatique qu'il convertissait les chrétiens au Judaïsme.
Le Negus cherchait à s'en emparer ; alors il disparut, enlevé
comme Hénokh par Dieu.
Les Falashas étaient agriculteurs ou
forgerons, parfois bijoutiers comme les Juifs du Yémen. Certains
les considéraient comme des sorciers qui pouvaient manipuler les
esprits (zar).
Témoignages et sources
Encyclopedia judaica
Jewish Encyclopedia
Les cahiers du Judaïsme n° 10 - automne
2001
" The thirteenth gqte " par
Tudor Parfitt - ed Weindenfeld and Nicolson -1987
Jerusalem Post - 1990
Communauté nouvelle - Paris 1979
Albert Soued - novembre 2002