LES SYMBOLES DANS LA BIBLE

LE SENS CACHÉ DES LETTRES HÉBRAÏQUES

SAMEKH

Quinzième lettre de l'alphabet, Samekh est obtenue par un sifflement entre les dents. Sa forme arrondie et massive est comme celle d'un roc. Le dessin à l'origine était différent: trois traits horizontaux barrés par un trait vertical, dessin de l'hiéroglyphe "tét" représentant un tronc d'arbre, "support" de la dépouille d'Osiris et dont le sens est la stabilité.

D'après la Qabalah, le dessin du signe Samekh est fermé car il est à l'image du vide qui s'est installé, après le "retrait" du divin, pour permettre la Création. Mais le vide n'est pas absolu: un résidu de la lumière originelle est resté confiné, une impression, une conscience du divin y est potentiellement contenue, comme dans le vase d'épanchement des étincelles de lumière originelle, appelé séphirah.

Le cercle qui se referme sur lui-même est aussi une fin: le cercle est une fermeture, une prison, un "coral" où on tourne en rond, par instinct, nécessité ou entêtement. Mû par la magie, le cercle devient un enfermement sans aucune échappée possible. Mais le cercle peut être aussi une lumière enveloppante ou un soutien matériel et tangible. En effet le sens de la lettre Samekh est celui de support et de soutien: appui pour le pauvre, pour l'opprimé, soutien pour le déprimé ou le diminué ou pour celui qui tombe.

Examinons aussi le sens de mots formés à partir de la lettre Samekh, pour mieux en saisir la portée.

Siman ou Samekh-man est le signe, le symbole, l'augure. La caille ou la manne qui tombent du ciel sont autant de signes pour les Hébreux errant dans le désert. Samekh est le soutien, man est le questionnement: le symbole est le support de la "question" de chacun, de son interrogation.

Associé aux eaux fermées du "Mém final", Samekh donne "sam" qui signifie aussi bien le parfum que le poison, deux sortes d'enfermement ayant néanmoins chacun, à travers la lettre Samekh, une lueur d'espoir: un instant de bonheur physique émanant du parfum, une possibilité de libération ou de fuite dans la mort, par le poison.

Le secret "sod" ou samekh-waw-dalet se trouve dans le cercle d'amis autour d'une table ou le cercle de comploteurs; mais le cercle n'est jamais totalement fermé: le secret suinte déjà par la porte du dalet.

Associé à la maison Bet, Samekh donne "sab", l'ancien, le sage qui est ici le soutien de cette maison et le garant de sa perpétuation. Il s'agit aussi de l'Ancien des Jours, le maître de l'Univers, le Rocher de la maison.

La valeur de ce signe est soixante, substance du monde matériel créé pour soixante siècles, d'après la Tradition. I1 est la substance du peuple d'Israël, représenté par les six cent mille âmes sortant d'Egypte, la substance des soixante traités du Talmud et des soixante degrés de toute âme. De même dans l'espace, la plus grande dimension du Temple de Jérusalem est de soixante coudées, donc sa substance.

Le miracle de ce rocher apparemment inanimé est d'être un appui protecteur et une mémoire recevant et gardant la trace d'une lumière oubliée et par cela même la substance de toute chose.

A'YIN

La seizième lettre de l'hébreu vient du fond de la gorge comme la lettre H'eth. Elle est spécifiquement sémitique, difficile à prononcer ailleurs qu'en Orient.

Elle a la forme d'une fourche ou d'une fronde. En fait, sa forme d'origine est liée à l'oeil. Ce signe suggère aussi bien les eaux naissantes rejoignant un torrent que la lumière jaillissant d'un oeil et se reflétant dans le miroir d'autrui.

D'après la Qabalah, A'yin est formée des deux lettres Waw et Noun fermé: elle aurait la droiture du signe Waw et la fermeture du signe Noun ainsi que son humilité.

Le sens de la lettre A'yin est la source, l'oeil suggérant un flot, une coulée de lumière ou d'eau. L'oeil contemple un paysage, il est inspiré par le symbole de l'échelle, qui permet de communiquer. Le regard du pauvre et du démuni brille d'intensité et de désir. L'oeil du poisson reste toujours ouvert à l'état de veille (voir Noun).

Voici quelques mots contenant cette lettre et illustrant notre propos. Lié à Dalet, le pauvre, A'yin forme le mot témoin (é'd): le témoignage implique un oeil ouvert et averti mais celui-ci a des limites et l'information du témoin est toujours pauvre.

L'oeil rond et vide de sens caractérise bien le veau dont le nom est "é'guel" ou a'yin-ghimel-lamed.

Lié à Resh, la tête, A'yin forme le mot éveillé (é'r): ainsi l'oeil s'entrouvre d'abord puis la tête comprend. Lié à la lettre Zayin, armure ou parure, A'yin donne "o'z", la force ou "é'z", la chèvre: la force est moins dans l'armure que dans l'oeil qui reflète le courage intérieur; par ailleurs, on connaît l'oeil naturellement fardé de la chèvre.

De même, "A'yin", la source, est au-dessus de la maison, le nuage étant "a'b" ou a'yin-bet, la source d'eau de la maison.

A'yin a une valeur de soixante-dix, le sept amplifié dans l'accomplissement du dix. A'yin représente le nombre des peuples de la terre, le nombre des Justes qui accompagnent Moïse lors du don de la Torah et le nombre des âmes de la famille de Jacob entrant en Egypte.

A'yin abreuve et étanche la soif; mais cette source peut tarir. A'yin est un regard profond attendri, compatissant ou placide mais aussi inquisiteur, accusateur ou cherchant à plaire: il a besoin de Noun pour voir clair. A'yin est aussi à la fois une origine profonde et une cible apparente: dans les deux cas elle est une cavité arrondie.

 

Albert SOUED - décembre 1989

Prochaine conférence: les lettres pé-tsadé

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